EXILING

ExiLing :

Étude psycholinguistique de l'expérience de l'exil


Présentation du projet

  • 1. Contexte du projet

    Le projet ExiLing est dédié à l'étude des défis linguistiques et culturels rencontrés par les personnes exilées, en se concentrant sur leur impact sur la santé mentale et les psychotraumatismes. L'exil, souvent résultant de conflits armés, de persécutions ou de catastrophes, plonge les personnes dans des environnements où la langue et les codes culturels leur sont étrangers. Cette rupture dans la continuité culturelle et linguistique peut exacerber les vulnérabilités psychiques et aggraver les conditions de stress post-traumatique.

    Pour survivre, les migrant.e.s et les réfugié.e.s doivent s'adapter à un nouvel environnement a priori hostile, incluant un nouveau système social et sanitaire souvent sans maîtrise suffisante de la langue ni de la culture d'origine, ce qui complique l'accès aux soins et à une écoute appropriée de leurs expériences traumatisantes.

    Cette inadéquation linguistique et la méconnaissance culturelle peuvent entraîner des malentendus, des diagnostics imprécis, ou encore une prise en charge inadaptée, laissant les traumas psychiques mal ou non traités.

    Le projet ExiLing propose donc de développer une méthodologie d'analyse pour identifier les marqueurs psycholinguistiques et psychoculturels spécifiques aux récits de l'exil, permettant une meilleure compréhension et intervention dans le traitement des traumatismes

    .En mettant l'accent sur l'amélioration des services d'interprétariat et de médiation linguistique, le projet vise à faciliter une expression fidèle des expériences traumatiques, en vue de faciliter l'intégration sociale des personnes exilées.


  • 2. Objectifs du projet

    Le projet ExiLing vise à étudier, à travers l'expression linguistique individuelle et collective, les conséquences de l'exil en termes de santé mentale.

    La problématique identifiée est celle des vulnérabilités que génère l'expérience de l'exil sous toutes ses formes. En effet, les migrants et les réfugiés présentent des vulnérabilités particulières au regard d’un parcours d’exil souvent éprouvant qui peut fragiliser leur santé physique ou mentale.

    Les réfugiés accueillis dans le cadre des programmes de réinstallation sont particulièrement vulnérables. C’est pourquoi plusieurs actions sont prévues par les autorités pour faciliter l’accès à la prévention et aux soins telles que le fait de :

    1. Favoriser le recours à la médiation et à l’interprétariat linguistique, l’information bilingue ou multilingue, ainsi que d'autres services linguistiques susceptibles de faciliter l'intégration et l'inclusion.

    2. Renforcer et formaliser la détection et le suivi des vulnérabilités dès la demande d’asile et tout au long du parcours de santé. Une attention particulière est portée à la santé mentale et au suivi psychologique pour les personnes en souffrance (victimes de stress post-traumatique, de violences) en lien avec le développement de l’interprétariat et de la médiation.

    Dans cette perspective, le manque d'analyses et d’outils pour la détection des marqueurs psycholinguistiques et des marqueurs psychoculturels ou encore psychotraductionnels peut être préjudiciable.

  • 3. Méthdologie du projet

    La méthodologie du projet ExiLing est fondamentalement interdisciplinaire, combinant les compétences et les connaissances de plusieurs domaines. Cette convergence d'expertises est essentielle pour développer des analyses qui sont à la fois innovantes et adaptées aux complexités des vulnérabilités de l'exil.

    La recherche s'appuiera sur l'expertise de spécialistes dans les domaines des sciences du langage et des études culturelles, de la psychiatrie et de la psychologie clinique. Chaque domaine pourra apporter sa contribution pour une compréhension plus précise du problème :

    1.  Les linguistes apporteront leur expertise sur l'usage du langage dans diverses cultures.

    2. Les psychiatres contribueront avec leur connaissance des mécanismes psychologiques sous-jacents.

    3. Les spécialistes en études culturelles aideront à interpréter les données dans le bon contexte culturel.


Démarche de la recherche

  • 4. Phases de la recherche

    Pour atteindre ses objectifs, le projet ExiLing organise sa démarche de recherche autour de trois phases principales, chacune conçue pour affiner les méthodes d'évaluation des traumatismes psychiques chez les personnes exilées.


    4.1. Collecte de données


    La première phase du projet consiste en la collecte de données linguistiques et narratives auprès des personnes exilées. Cette collecte se fera à travers des entretiens, des groupes de discussion et l'analyse de documents personnels tels que des journaux et des correspondances dans la langue d'origine et d'accueil des personnes.

    L'objectif est de recueillir un large éventail de matériaux verbaux et écrits qui reflètent l'expérience de l'exil, en veillant à ce que les données soient diversifiées et représentatives des différentes communautés linguistiques et culturelles.

    Les protocoles éthiques seront suivis pour assurer la protection et le respect des personnes.


    4.2. Analyse des données


    Dans la deuxième phase, les données recueillies seront soumises à une analyse approfondie utilisant des méthodes de traitement automatique du langage naturel (TALN) ainsi que des techniques d'analyse qualitative traditionnelles.

    L'objectif est de détecter des schémas et des modèles expressifs qui pourraient indiquer des expériences traumatiques.

    Cette phase impliquera également une analyse comparative pour identifier les différences et les similitudes dans les expressions de trauma à travers différentes langues et cultures.


    4.3. Extraction des marqueurs


    La dernière phase se concentre sur l'extraction des marqueurs psycholinguistiques, psychoculturels, et communicationnels identifiés durant l'analyse. Ces marqueurs seront systématiquement catalogués et analysés pour évaluer leur pertinence et leur fiabilité en tant qu'indicateurs de psychotraumatisme.

    L'objectif est de développer un ensemble de critères qui peuvent être utilisés pour améliorer les diagnostics et les interventions cliniques. Cette phase comprendra également le développement et la validation d'outils et de protocoles qui pourront être intégrés dans les pratiques cliniques et de soutien aux exilé.e.s.


    Tout au long de ces phases, le projet prévoit des mécanismes de révision et d'ajustement basés sur les retours d'information des participant.e.s et des chercheur.e.s impliqué.e.s.


  • 5. Marqueurs recherchés

    Le projet de recherche ExiLing se concentre sur l'analyse et l'extraction de plusieurs types de marqueurs liés à l'expression verbale des vulnérabilités de l'exil.


    5.1. Marqueurs psycholinguistiques


    Le projet cherche à identifier et analyser les marqueurs psycholinguistiques dans les expressions des exilé.e.s, tels que les spécificités dans le choix des mots, les structures syntaxiques, et les modèles narratifs qui peuvent indiquer un état de stress ou de trauma.

    L'objectif est de déceler comment le trauma influence la langue parlée ou écrite, ce qui peut révéler des indices cachés de souffrance psychologique non exprimée ou mal articulée à cause des barrières linguistiques.


    5.2. Marqueurs psychoculturels


    Cette partie du projet se concentre sur les influences des contextes culturels d'origine et d'accueil sur l'expression des traumatismes. Les marqueurs psychoculturels incluent les références culturelles spécifiques, les métaphores, ainsi que les tabous qui façonnent la manière dont les traumatismes sont verbalisés (mise en discours).

    Comprendre ces marqueurs vise à contextualiser les récits de trauma dans leurs cadres culturels spécifiques pour aboutir à une évaluation à la fois empathique et plus précise des besoins psychologiques des exilé.e.s.


    5.3. Marqueurs psychotraductionnels


    L'objectif ici est de comprendre les défis et les dynamiques de la communication entre les exilé.e.s et les professionnels de santé, en particulier dans les interactions où interviennent des médiateurs linguistiques et des interprètes.

    Les marqueurs psychotraductionnels comprennent des aspects tels que les schémas interactionnels, la clarté de l'expression, l'efficacité de la traduction/interprétation, ou encore les malentendus potentiels qui peuvent survenir.

    Analyser ces marqueurs permet d'améliorer les stratégies de communication (verbale et non verbale) pour s'assurer que les exilé.e.s puissent exprimer leurs expériences et leurs besoins, tout en mettant en place un cadre de communication adapté à leurs particularités linguistiques et culturelles.


  • 6. Impact de la recherche

    Le projet ExiLing est conçu pour avoir une meilleure compréhension des vulnérabilités psychiques chez les populations exilées, en intégrant des marqueurs psycholinguistiques et psychoculturels dans les évaluations cliniques.


    6.1. Améliorer la connaissance des vulnérabilités de l'exil


    En fournissant aux professionnels de santé mentale des outils pour mieux comprendre les expressions linguistiques et culturelles de la souffrance, le projet permettra une compréhension et une identification plus précise des vulnérabilités, évitant ainsi les interventions tardives qui peuvent compromettre la récupération.


    6.2. Améliorer les services de médiation linguistique


    De plus, en identifiant les défis communicationnels spécifiques aux exilé.e.s, le projet contribuera à l'amélioration des services d'interprétariat et de médiation linguistique. Cela garantira que les interventions soient menées dans une langue et un style communicationnel qui respectent la dignité et les besoins culturels des personnes, afin de faciliter leur intégration et leur rétablissement.


    6.3. Améliorer la formation professionnelle des intervenants.e.s 


    Le projet aura également un impact sur la formation des professionnel.le.s de la santé mentale, des interprètes et des médiateurs interculturels, en les sensibilisant aux nuances linguistiques et culturelles qui affectent les personnes exilées.


    6.4. Améliorer l'intégration sociale des exilé.e.s


    À long terme, le projet ExiLing a le potentiel de réduire la stigmatisation et d'améliorer l'intégration sociale des exilé.e.s en promouvant une meilleure compréhension de leurs expériences et de leurs besoins spécifiques.

    En améliorant la communication entre les exilé.e.s et la société d'accueil, le projet contribuera à un environnement plus inclusif pour toutes les personnes, indépendamment de leur origine ou de leur statut migratoire.


Share by: